En confinement chez soi - Mardi 26 mai 2020 - Club lecture

Compte

 

Compte rendu du 26 mai 2020 (en confinement chez soi)

Albert Camus avec LA PESTE, un écrivain toujours d’actualité

Les deux charges qui font la grandeur du métier d’écrivain : le service de la vérité et celui de la liberté… A. Camus

BIOGRAPHIE D’ALBERT CAMUS (1913-1960)

Albert Camus est né le 7 novembre 1913 en Algérie française dans une famille modeste : son père est ouvrier caviste, sa mère illettrée et en partie sourde fait des ménages. Son père engagé comme zouave meurt dès le début de la guerre 14. La famille s’installe dans un quartier pauvre d’Alger. Il est élève boursier au lycée d’Alger. Mais à 17 ans, il est atteint de tuberculose. Il poursuit ses études en Lettres supérieures, puis en philosophie à la faculté d’Alger. À 21 ans, il adhère au Parti communiste dont il sera exclu 2 ans plus tard. Avec un diplôme d’études supérieures section philosophie, il devient responsable de la Maison de la Culture d’Alger et fonde et anime le Théâtre du travail.

Sa carrière va commencer : écrivain, essayiste, dramaturge, metteur en scène de théâtre, journaliste mais il n’a jamais prétendu être philosophe :

Tout en étant journaliste au journal Alger républicain, il commence à écrire à 25 ans ses premières grandes œuvres, sa trilogie de L’Absurde : L’Étranger (roman), Le mythe de Sisyphe (essai) et Caligula (pièce de théâtre).

Il arrive à Paris en 1940 et travaille dans des journaux : Paris-Soir puis Combat et il s’engage dans la Résistance. À la libération de Paris, il devient rédacteur en chef de Combat qui n’est plus un journal clandestin. L’éditeur Gallimard publie L’Étranger et Le mythe de Sisyphe. Sa santé est toujours très fragile à cause de la tuberculose. Il a des enfants en 1945 : des jumeaux Catherine et Jean nés de son union avec sa deuxième femme Francine Faure. À 34 ans, il quitte le journal Combat et publie son livre La Peste qui obtient un grand succès et le Prix des Critiques en 1947. Il crée des pièces de théâtre (Le Malentendu, Caligula, L’État de siège, Les Justes) et fait des adaptations théâtrales d’auteurs comme Dino Buzzati, Faulkner, Calderon…, pièces qui sont jouées par des comédiens comme Gérard Philippe, Michel Bouquet, Serge Reggiani, Catherine Sellers, Maria Casarès avec qui Camus aura une liaison. Son essai publié en 1951 L’Homme révolté suscite une violente polémique et provoque sa rupture sur le plan politique avec Jean-Paul Sartre, Camus fustigeant les États totalitaires dans cet écrit.

En 1954, c’est le début de la guerre d’Algérie. Camus fait un appel à la trêve qui sera mal perçu par ses compatriotes. Il choisit finalement de ne pas prendre parti dans la question algérienne. Il travaille pour le journal L’Express et publie son récit La Chute.

Le 17 octobre 1957, à 44 ans, il obtient le Prix Nobel de littérature et fait paraître son recueil de nouvelles L’Exil et le Royaume.

Le 4 janvier 1960, il meurt dans un accident de voiture dans l’Yonne, le conducteur de la voiture est son ami l’éditeur Michel Gallimard qui succombe aussi à ses blessures. Albert Camus est enterré dans le Vaucluse à Lourmarin où il possédait une maison. « Pour tous ceux qui l’ont aimé, il y a dans cette mort une absurdité insupportable » écrira Jean-Paul Sartre.

SON OEUVREcomprend des récits, essais, pièces de théâtre, nouvelles autobiographiques, notes de travail, articles de journaux.

Albert Camus éprouve beaucoup de mal à écrire, à mettre au point un manuscrit.

Son œuvre est hantée par la mort : le suicide, le meurtre, les victimes, les condamnés, ses personnages sont confrontés à des expériences-limites, souvent celle de la mort.

Trilogie de L’Absurde : L’Étranger (roman), Le mythe de Sisyphe(essai), Caligula (pièce de théâtre)

Trilogie de la révolte : La Peste (récit), L’Homme révolté (essai), Les Justes (pièce de théâtre)

Cycle de Némésis : à peine commencé avec Le premier Homme (autofiction), manuscrit qu’on retira de la voiture où il trouva la mort et publié à titre posthume.

L’Envers et l’Endroit constitue un recueil de 5 nouvelles autobiographiques. Ses Carnets écrits de 1935 à sa mort sont des notes de travail, presque un journal intime, ils seront publiés à titre posthume. Ces Carnets permettent de comprendre l’œuvre et les intentions de l’auteur.

Il a plus de succès avec ses adaptations théâtrales d’auteurs qu’avec ses propres créations originales excepté sa pièce Caligula.

Camus a choisi de pratiquer un journalisme critique avec des articles dans différents journaux qui montrent un homme attentif, témoin des grands problèmes de son temps comme la misère en Kabylie ou les rapports Est-Ouest après la seconde guerre mondiale.

Même si le club lecture de l’UTEL ne fonctionne pas actuellement, les lectrices et lecteurs qui le composent continuent à lire et ont déniché ce mois-ci en librairie ou sur leurs étagères une belle diversité de nouveautés et de classiques.

Véronique a relu LA PESTE (1947) : Albert Camus est décédé tragiquement il y a 60 ans. Dans le contexte actuel, sa fiction LA PESTE nous donne matière à méditer. Le début du récit: L’action se déroule dans les années 40 à Oran en Algérie, une étrange maladie fait mourir les rats en très grand nombre, puis les humains. Le docteur Rieux pense qu’il s’agit de la peste. On en vient bientôt à fermer la ville…

Les circonstances de l’écriture de ce livre: Camus dès 1939 se documente sur la peste au niveau historique et médical. Il commence à écrire LA PESTE au cours de l’été 1942, une première version est terminée en janvier 1943. Peu satisfait, il entreprend aussitôt une seconde version. Et l’achèvement de l’histoire lui demande des efforts inouïs. Quand il ferme le livre fin 1946, il est encore plein de doutes. « De toute ma vie, jamais un tel sentiment d’échec » (Carnets). Il confie quand même son ouvrage à son éditeur qui le fait publier en juin 1947. Le succès de LA PESTEest alors immédiat.

Les différentes lectures de l’œuvre: Camus voulait que LA PESTE « se lise à plusieurs portées », il peut donc y avoir différentes interprétations de ce livre:

On peut y voir la simple chronique d’une épidémie à Oran, racontée par un narrateur resté longtemps mystérieux. Avec l’aide d’un groupe d’amis et de connaissances, un médecin livre une lutte acharnée contre la peste. On découvre les ressentis, les réactions d’une collectivité et d’individus face à l’épidémie. On peut voir des similitudes avec notre situation actuelle en temps de coronavirus : la sous-estimation du danger, la sidération, les mesures de confinement, la solidarité.

Mais Albert Camus évoque la portée symbolique de son livre dans ses Carnets en 1942. Au moyen de l’image de la peste, il veut exprimer l’oppression « l’étouffement dont nous avons souffert et l’atmosphère de menace et d’exil que nous avons vécue (pendant l’Occupation allemande lors de la 2nde guerre mondiale). Je veux du même coup étendre cette interprétation à la notion d’existence en général ». Dans leur ville fermée et coupée du monde, les Oranais deviennent des prisonniers (Camus avait choisi d’abord ce titre Les Prisonniers). Séparés des êtres qui leur sont chers, aux prises avec l’angoisse, ils sont tout à coup placés dans un extrême dénuement qui les oblige à réfléchir à leur propre existence avec lucidité. Et l’Homme, confronté à la souffrance extrême, est obligé de dévoiler sa face cachée : lâcheté, découragement mais aussi force de caractère. Pour Camus, les personnages de LA PESTEdont l’engagement est fait de courage, modestie et pragmatisme incarnent les vraies valeurs du livre : l’universalité du mal, l’impuissance de l’intelligence à expliquer le fléau et le sentiment de fraternité qui sous l’influence du mal rend les hommes malgré eux solidaires. La peste ici n’est donc pas source de romanesque, mais de réflexion.

Des lectrices et lecteur du club lecture ont lu aussi des livres où la nature en toile de fond ressource et révèle bien des mystères comme :

DANS LA FORÊT de l’écrivaine Jean Hegland (2017) : Catherine a beaucoup aimé lire ce roman américain, un vrai coup de cœur ! Nell et Eva, 17 et 18 ans, vivent toujours dans leur maison familiale au cœur de la forêt. Quand la civilisation s’effondre et que leurs parents disparaissent, elles demeurent seules, bien décidées à survivre. Il leur reste toujours présentes, leurs passions de la danse et de la lecture, mais face à l’inconnu il va falloir apprendre à grandir autrement, à se battre et à faire confiance à la forêt qui les entoure, remplie d’inépuisables richesses…

LE RÉVEIL DES SORCIÈRES de Stéphanie Janicot (2020) : Marie-Pierre a lu ce roman policier et métaphysique qui ravira les amateurs de Bretagne (la forêt de Brocéliande) et de secrets de famille. Ce roman se lit d’abord comme un polar qui commence par la mort de Diane, une mère de deux filles de 18 et 13 ans, guérisseuse et médium. La plus jeune des filles, Soann, est une petite sorcière en devenir et elle soupçonne un assassinat. Elle va mener l’enquête avec l’aide de la narratrice, une amie de la défunte. Ce livre donne lieu à une réflexion sur les femmes sorcières au Moyen-Âge, sur la voyance. Stéphanie Janicot dit qu’elle l’a écrit comme un roman de consolation. C’est une manière de convoquer les morts, de découvrir où vont nos défunts. La sorcière est un intermédiaire entre le monde réel et le monde des esprits…

MÊME LES ARBRES S’EN SOUVIENNENT de Christian Signol (2019): Émilien né en 1915 était un paysan d’un haut plateau de la Corrèze. Lucas, son arrière-petit-fils, décide de restaurer la maison de famille qui résonne encore de l’histoire familiale et, pour mieux s’en imprégner, demande à Émilien d’écrire le récit de sa vie. Ce roman de terroir instructif et revitalisant qui nous plonge dans la vie des campagnes du début XXème siècle a beaucoup ému Régine. Va-t-on revenir un jour à la campagne sans pesticides et biologique de nos ancêtres ?

REGAIN de Jean Giono (1930) : À Aubignane (village fictif), il ne reste que trois habitants : Gaubert, La Mamèche et Panturle. Mais bientôt, Gaubert part vivre chez son fils et La Mamèche disparaît après avoir promis à Panturle de lui envoyer une femme. Quelques temps plus tard, un rémouleur Gédémus accompagné d’une jeune femme Arsule s’arrête dans le village. Panturle, solitaire et sauvage, les suit et à la nuit tombée tombe dans un ruisseau. C’est Arsule qui viendra le sauver et tous deux feront revivre le village. Un éloge du travail de la terre, de l’amour tout simple et de l’amitié qui a plu à Pascal.

On a lu des thrillers haletants comme :

LA RUMEUR de Lesley Kara (2020): Joanna vit avec son fils Alfie, près de sa mère dans une petite ville balnéaire d’Angleterre. Pour se faire des relations, elle rejoint un club de lecture où les commentaires vont bon train. Joanna y apprend que se cacherait dans la ville « Sally Mc Gowan » coupable d’avoir à 10 ans tué un petit garçon. Curieuse de nature, Joanna se met à enquêter sur cette affaire. Son compagnon journaliste d’investigation l’aide dans ses recherches, lui-même intéressé avec l’intention d’en écrire un livre. La rumeur va courir dans la ville et beaucoup d’événements vont troubler les amis du club lecture. La découverte que va enfin faire Joanna va bouleverser sa vie… La fin du livre est à la fois passionnante et angoissante. (Françoise)

LES GARDIENNES DU SILENCE de Sophie Endelys (2019): Henriette a lu ce thriller ésotérique. Chloé archiviste a découvert un vieux manuscrit pratiquement illisible dans la maison de vacances de ses parents à Fécamp, chaque mot déchiffré conduit à une rencontre. L’enquête la mène sur une île de la mer du nord où a vécu autrefois son père. Chloé va y découvrir un monastère perdu dans la lande. Mais qui sont ces ombres que l’on aperçoit de loin ? S’agit-il d’une secte ? Quels secrets sont gardés dans le silence de ce monastère ?

MONSIEUR RIPLEY de Patricia Highsmith (1950): Tom Ripley est un jeune homme mal dans sa peau qui ne vit que de petites arnaques. Le père d’un vague ami, Dickie Greenleaf, l’accoste à New-York et lui demande de se rendre en Italie pour convaincre Dickie de rentrer aux USA pour reprendre l’activité familiale. Le père lui paie le voyage et lui donne de l’argent pour cette mission. En Italie, Tom va rencontrer Dickie qui mène grand train de vie, et son amie Marge. Dickie opère une vraie fascination sur Tom. Un jour Tom tue Dickie (le mobile est donné à la fin du livre), prend son identité et dispose de son argent. Commence alors un long jeu du chat et de la souris avec la police, où Tom est tantôt Tom, tantôt Dickie. Sera-t-il démasqué ? Ce thriller psychologique a été adapté très librement dans le merveilleux film « Plein soleil » avec Alain Delon, Maurice Ronet et Marie Laforêt. ( Christian)

On a lu des livres mettant en scène des personnages pittoresques et attachants comme :

L’ENFANT QUI MESURAIT LE MONDE de Metin Arditi (2017): L’action se passe en Grèce de nos jours sur fond de crise économique. Sur une île, Yannis, enfant autiste de 11 ans, vit avec sa mère Maraki. Il veut éviter « les désordres » du monde mais surtout de son île. Yannis est rassuré par les chiffres qui rythment sa vie et Eliot un voyageur venu d’Amérique qui partage la même passion des nombres deviendra son ami…Un livre pétillant d’intelligence, de sensibilité, d’émotion et parfois drôle, plein de dérision et lumineux sur la Grèce, son Histoire et le peuple grec. (Elisabeth)

OTAGES de Nina Bouraoui (2020), Angèle a été émue par ce portrait magnifique d’une femme d’aujourd’hui Sylvie, courageuse et puissante que le quotidien empêche de vivre libre. Un hommage à tous les otages économiques et amoureux que nous sommes…

Michèle a lu VANIA, VASSIA ET LA FILLE DE VASSIA de Macha Méril (2020) : le parcours à travers le XXème siècle d’une famille de cosaques arrivée en France avec le statut d’apatride. Ils se sont installés en Corrèze avec leurs chevaux, leurs valises et leurs souvenirs. Puis les trois personnages vont se mettre en quête d’un avenir, mais un avenir lu, par chacun d’entre eux, sous un angle différent. Macha Méril dit avoir écrit ce livre en se servant librement de tout ce qu’elle a accumulé : souvenirs, expérience, vécu…

Angèle a lu CEUX QUI PARTENT de Jeanne Benameur (2019) : Un jour et une nuit à Ellis Island en 1910, le temps pour les migrants juste débarqués de passer les contrôles, d’être acceptés ou rejetés. Pendant ce moment de flottement suspendu entre le monde d’avant et le monde d’après, plusieurs destins vont se croiser : Esther l’Arménienne, Gabor le gitan, les Italiens Emilia et son père, Andrew le photographe, Hazel la prostituée. L’exil comme l’accueil exigent de la vaillance…

ALLONS VOIR PLUS LOIN, VEUX-TU ? (2002), Francelyse a été agréablement surprise par cette fiction écrite par Anny Duperey : Christine, Paul, Solange, Luc vivent un moment de leur existence dans des circonstances imprévues chacun de leur côté mais ils finiront par se croiser et leurs histoires ne feront plus qu’une. Des personnages attachants, comme des amis…

On a relu des classiques inoubliables:

UNE VIE de Guy de Maupassant (1883): Jeanne à 17 ans sort du couvent où elle a été cloîtrée pendant 5 ans. Elle rejoint la demeure familiale. De nature rêveuse, elle attend le prince charmant, elle l’espère, elle l’imagine et, un jour, elle rencontre un aristocrate avec qui elle va se marier. C’est le début d’une vie de mensonges et d’infidélités. Assez faible de caractère, Jeanne ne se rebellera jamais. Dominée par tout le monde, elle subira des humiliations. Malgré tout, le roman se termine sur une petite lueur d’espoir. C’est le premier roman de Maupassant, il semble avoir été influencé par Flaubert et Madame Bovary. (Pascal)

LE GRAND MEAULNES d’Alain-Fournier (1913): Qui ne se souvient de ce livre qui commence par : « Il arriva chez nous un dimanche » ? Il, c’est Augustin Meaulnes, bien sûr, qui va bouleverser la vie du narrateur : François Seurel. Qui ne se souvient de la fugue de Meaulnes qui arrive dans le domaine mystérieux où se tient une fête étrange et merveilleuse donnée pour célébrer les fiançailles de Frantz de Galais ? Qui ne se souvient de la rencontre de Meaulnes avec la très jolie Yvonne de Galais ? Qui ne se souvient des efforts déployés par Meaulnes et son ami pour retrouver la belle jeune fille ? Ce livre a bercé notre adolescence et entretenu nos rêves. Et c’est un réel plaisir de le redécouvrir. C’est un roman où le merveilleux et le mystérieux l’emportent, mais le disputent au tragique. C’est aussi un roman à suspens habilement construit. On pourrait le juger un peu naïf, démodé, mais c’est un vrai classique qui trouve toute sa place encore aujourd’hui, car le rêve restera toujours une merveilleuse possibilité d’aborder la vie. (Christian)

Merci à tous les lecteurs et lectrices du club lecture qui ont su si bien parler de leurs livres coups de cœur ! Crise de coronavirus oblige, nous nous retrouverons sur le site de l’UTEL le 23 juin.

D’ici là, restons toujours bien prudents et lisons sans modération !

Véronique

 

 

 

Les participants présentent des livres qu'ils ont lus et qui les ont séduits ou intéressés, en font un bref résumé et exposent leurs appréciations. Au gré de chacun, les livres sont prêtés à l'un ou à l'autre. Ces échanges permettent naturellement la communication et une meilleure diffusion des œuvres qui le méritent.

Le quatrième mardi du mois à 14h30 - Chapelle des Soeurs Noires

Responsable : Mme Véronique Lefebvre

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