Les grands abbés de Liessies:

- Gontrad en 795

- Louis de Blois de 1530 à 1566

- Marc Verdier de 1776 à 1791

Le livre : Yves Briche - SEPT SIECLES AVEC LES MOINES DE LIESSIES (1095-1791)

La Croix du Nord - 2 avril 2014 - Philippe Courcier

 

Ce 22 mars, Yves Briche, retraité du notariat, fait église comble à Liessies, dans l’Avesnois. Au-delà d’une somme historique de l’amour porté aux Laetitiens (Liessies doit son nom au mot Laetitia, joie en latin) – dont Muriel, son épouse, native du lieu -, l’auteur livre une étude fouillée sur les moines de Liessies, de 1095 à 1791, point final à l’aventure religieuse. Un travail sans précédent.

Si tout commença en 764 avec le don, par Pépin le Bref, d’un territoire entre Thiérache et Hainaut (rattaché à la France en 1678) à Gontrad et Hiltrude, il faudra attendre la fin du XIe siècle pour voir s’implanter l’abbaye bénédictine, ses trois cloîtres, son église abbatiale, la maison de l’abbé, le château des hôtes, le cimetière… Mais, interroge Yves Briche, qui furent ces centaines de moines et leurs 48 pères abbés qui vécurent, prièrent et travaillèrent à Liessies ? Quelle prospérité, quelles épreuves ?

La vie de l’abbaye – dont il reste le parc abbatial, lié à l’Écomusée de l’Avesnois, et l’église paroissiale Saint Jean – ne fut pas un long fleuve tranquille. École de calligraphie et d’enluminures, désordres financiers, pèlerinages expiatoires, prieurés et refuges en Belgique, figure marquante de Louis de Blois, abbé (1530-1566), qui adoucit la règle de saint Benoît, celle d’Agapite Dambrinne, abbé de 1708 à 1740 qui vit la reconstruction de la Motte, et Marc Verdier, dernier abbé.

Les 550 hectares de l’abbaye sont très convoités, on parle d’un « petit désert », d’un cadre « enchanteur » avec cette invite monastique : « Voyez, aimez, baisez la poussière de Liessies ! »…

Modèle d’observance, le monastère facilite l’implantation des jésuites au Pays Bas. Il est dit qu’« aucune abbaye belge ne dépasse celle de la petite Suisse du Nord en ferveur et activité intellectuelle ». On en parle jusqu’à Versailles, à la cour du roi. Vient la Révolution française et l’assaut de la paysannerie à Maroilles, Hautmont, Liessies. Le 27 juin 1791 sonne l’exil avec le départ des 50 personnes employées par les moines, le pillage de la bibliothèque et ses 9 000 ouvrages, le vol des 174 tableaux disparus à jamais ! Les habitants de Dompierre-sur-Helpe vinrent reprendre par les armes les reliques de saint Etton.

Yves Briche, dans sa recherche, a recensé pas moins de 2660 articles (dossiers, boites) consacrés à une folle épopée. Que devinrent les 27 derniers moines ? Vingt furent prêtres en Belgique, 3 se marièrent, 2 périrent en martyrs de la foi.

Au XXe siècle, trois prêtres mettent l’abbaye à l’honneur : le père Henri de Malherbe qui, de 1925 à 1942, échoua dans sa volonté de relancer une communauté religieuse, le chanoine Joseph Peter dont le doctorat sur Liessies-en-Hainaut présente la première histoire chronologique jusqu’à 1566, et le chanoine Maurice Chartier (1886-1961) , supérieur du séminaire de Cambrai, qui contribua grandement à vulgariser l’abbaye.

Yves Briche n’exclut pas une suite à son livre, des sujets comme l’alimentation ou la santé des moines pourraient être développés. « Ces personnages sont devenus mes compagnons d’écriture, il a fallu me supporter ! », dit-il avec humour, le regard tourné vers Muriel, leurs trois enfants et sept petits-enfants.

Aujourd’hui, seules quelques dépendances demeurent : écuries, bûcher aux moines – il abrite les rencontres internationales et interdisciplinaires de Liessies consacrées aux relations « sociétés/environnement » – vergers, prairies humides, ouvrages hydrauliques réalisés jadis.

Le village aux 550 âmes garde un caractère unique, saint Benoît, patron de l’Europe, y a laissé une trace indélébile.

Philippe Courcier

409 pages, 18 €, en vente à la librairie Vauban, 8 place Vauban à Maubeuge ou chez l’auteur 12 rue Rousies à Maubeuge. Tél. : 03 27 64