Les prisonniers de guerre: ils furent 650 000 en 1914-1918, et plus encore en 1939-1945 (plus de 2 millions en France, leur départ provoquant un, bouleversement humain, économique, affectif, familial sans précédent dans son ampleur comme dans sa durée. A partir du destin de l’un d’entre eux, cheminot du Nord parti pour la Prusse orientale, retour sur la réalité humaine et les drames ignorés de ces vaincus de l’ombre.)

Pour le froid de Prusse - Philippe Tabary

Un petit carnet miraculeusement sauvé de la poubelle au décès de son auteur, un ancien cheminot du nord, veuf et sans enfants, qui y raconte son vécu de prisonnier (1940-1945) en Prusse orientale : tel est le point de départ de ce récit où Ph. Tabary, passionné de cette région, dialogue avec celui qui l’a précédé de 70 ans dans ces terres hier allemandes et aujourd’hui polonaises, à la frontière de l’enclave russe de Kaliningrad (l’ex-Königsberg).

Ce récit aurait pu n’être qu’anecdotique mais à travers ce qu’il note, commente (avec la plus extrême prudence et de manière souvent très allusive), Marcel Soufflet permet de retracer l’histoire tragique de ces temps où la fureur des hommes le disputa à celle du climat. Ainsi, les simples propos du détenu anonyme deviennent cailloux du Petit Poucet pour baliser le chemin de l’épopée.

Sans ambition, mais pas sans ironie, sens de l’observation, poésie même, notamment lorsqu’il s’adresse à sa bien aimée lointaine, Marcel retrace le sort des obscurs, des sans-grade sans les muettes souffrances desquels il n’y aurait pas de victoire. Pour lui, une seule hâte : retrouver Feignies et Andréa pour ne plus les quitter qu’à la mort. Ce qu’enfin le sort des armes lui autorisera, mais après 1923 interminables journées d’un lancinant calvaire qu’il n’oublia jamais ! Et dont nous avons devoir de nous souvenir, nous aussi !

Sortie avril 2015, env. 200 pages

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